SOULEYMANE CISSé "A ILLUMINé LE MONDE DU CINéMA"

Souleymane Cissé, l'un des pères du cinéma sur le continent africain, est mort mercredi dans une clinique de Bamako, la capitale malienne. Un coup dur pour les cinéphiles, les cinéastes et pour le Burkina : le réalisateur malien était attendu ce jeudi à Ouagadougou où il devait présider le jury "fiction long métrage" pour la 29ème édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco) qui début dans deux jours.

Pluie d'hommages

Le décès du réalisateur malien, né le 21 avril 1940, laisse un grand vide dans le monde du cinéma. Il y a quelques jours, il s'entretenait encore avec l'acteur burkinabè Gustave Sorgho qui a tenu à lui rendre hommage au micro de Richard Tiéné, notre correspondant à Ouagadougou :

"Comme un coup de massue, la nouvelle est tombée. Triste est la réalité. Perte et perte encore énorme. Un baobab est tombé, les armes à la main, si j’ose dire, la caméra à la main, laissant un vide énorme. À l'annonce de la nouvelle, je pensais que j'étais dans un cauchemar. Pas plus tard qu'avant-hier, on s'est parlé. Il m'a confié une mission. Hier encore, il m'a rappelé. La mission est accomplie ? J'ai répondu 5 sur 5. Et la personne devait me revenir aujourd'hui pour son visa.

J'étais vraiment triste d'apprendre cette nouvelle. Comme disait Sembène Ousmane (réalisateur sénégalais ndlr), quand il est en train de partir, vous pleurez. Mais quand il venait aussi, vous étiez en joie. Qui sait là où il part ? Il sera reçu aussi les bras ouverts en joie. Tu as semé des pépites de par le monde. Tu as illuminé le monde du cinéma en Afrique. J'ose espérer qu'un jour, autour du bivouac sacré, tes mémoires vivront toujours et encore pour le Fespaco."

Parmi les autres hommages, celui du ministre malien de la Culture, Mamou Daffé qui a fait part de sa "tristesse" pour la disparition "de ce monument du cinéma africain", saluant aussi un "cinéaste admiré et respecté". Ou encore celui de Boubacar Sidibé, autre grand réalisateur malien : "Souleymane Cissé mérite tout notre respect et notre admiration" pour tout ce travail "qu'il a fait pour montrer au public les richesses du patrimoine culturel malien et africain".

Une œuvre plusieurs fois primée

Souleymane Cissé avait notamment reçu le Prix du jury au Festival de Canne en 1987 pour l'un de ses chefs d'oeuvre, "Yeelen" (La Lumière), qui raconte le long parcours initatique d'un jeune homme issu d'une famille bambara. En 2023, il avait été à nouveau récompensé à Cannes avec un Carrose d'Or, un prix spécial, décerné au cours de la Quinzaine des cinéastes. Et puis il avait aussi reçu à deux reprises, en 1979 et en 1983, l'étalon de Yennenga, la récompense suprême du Fespaco.

Message aux autorités maliennes

Quelque heures seulement avant sa mort, Souleymane Cissé tenait encore une conférence de presse à Bamako. L'occasion d'appeler les autorités maliennes à s'investir davantage en faveur des jeunes cinéastes : "Que les autorités nous aident à vulgariser nos oeuvres cinématographiques. Qu'elles comprennent que c'est le cinéma qui fait l'éclat du Nigeria ou du Ghana. Et c'est possible au Mali", a-t-il notamment plaidé. "Nous avons de jeunes cinéastes professionnels qui en sont pleinement capables. Il ne suffit pas de faire du cinéma, il faut que les oeuvres soient aussi visibles (...) Que les autorités nous aident avec la construction de salles de cinémas. C'est l'appel que je leur lance avant ma mort si Dieu le veut".

Souleymane Cissé est désormais parti sous d'autres cieux. Ses obsèques doivent avoir lieu vendredi à Bamako. Le Fespaco, lui, a lieu du 22 février au 1er mars.

Auteur: Richard Tiéné, Avec agences

2025-02-20T09:40:29Z